A l’heure où la pandémie du covid-19 risque de graver durablement ses conséquences sur l’économie mondiale, de nombreuses voix appellent à une annulation des dettes pour les pays les plus fragiles. En Tunisie, la dette publique a atteint 90% du PIB, enfonçant le pays toujours plus loin dans la spirale infernale de l’endettement.
Tous les indicateurs sociaux-économiques de la Tunisie sont au rouge aujourd’hui. Les gouvernements successifs ont échoué à trouver les réponses économiques adéquates aux demandes exprimées par la population en 2011, un échec qui s’explique à la fois par l’instabilité politique chronique, l’économie héritée depuis des années mais aussi par le service de la dette et les conditions imposées par les bailleurs internationaux. Les conséquences économiques de la pandémie du covid-19 viennent encore assombrir cette situation critique.
Les autorités ont pris des mesures en amont pour endiguer la propagation du coronavirus. En outre, la demande mondiale de certains produits et services tunisiens a diminué, ce qui a eu un impact négatif sur de nombreux secteurs, entraînant une baisse de la croissance attendue pour l’année 2020. Cette situation difficile a conduit à une baisse significative du volume des ressources de l’Etat, ce qui a nécessité la mobilisation de ressources extérieures supplémentaires.
Par ailleurs, lors de la préparation du projet de la loi de finances pour l’exercice 2021, une nouvelle vision a été adoptée pour déterminer les priorités au cours de cette phase reposant principalement sur le retour progressif du cycle économique, la préservation des emplois et la relance de la croissance.
En ce qui concerne les finances publiques, le scénario adopté vise à l’assainissement continu des finances publiques en améliorant les ressources propres de l’Etat par des mesures visant à rétablir un rythme de croissance positif à partir de 2021. Il s’agissait aussi de rationaliser la gestion et l’utilisation des dépenses de l’Etat par l’élaboration d’un programme global de restructuration du secteur public, et restaurer le rythme habituel de production dans les secteurs stratégiques qui soutiennent les ressources de l’Etat, relative à la préparation du projet de budget de l’Etat pour l’année 2021.
Contrer les répercussions négatives de la crise
Par ailleurs et pour contrer les répercussions négatives de la crise et limiter ses effets secondaires sur plusieurs secteurs tels que le tourisme, le transport, l’artisanat, le commerce extérieur et les industries exportatrices, le gouvernement a pris un ensemble de mesures exceptionnelles à caractère économique, financier et social.
Les mesures à caractère économique et financier visent à protéger le tissu économique national affecté par la crise, afin de lui permettre de conserver les emplois et de garantir un minimum de revenus aux petites et moyennes entreprises concernées. Quant aux mesures à caractère social, elles s’adressent principalement aux groupes sociaux vulnérables et démunis, aux revenus limités et aux personnes handicapées.
Pour faire face à cette situation critique, et la nécessité de maîtriser le niveau d’endettement à travers la réduction autant que possible du ratio de déficit budgétaire par rapport aux résultats actualisés de l’année 2020, un certain nombre de mesures ont été prises en 2021, dont notamment l’augmentation des crédits alloués au secteur de la santé, et ce, pour continuer le financement du plan national de prévention et de la lutte contre la pandémie du corona-virus. A ceci s’ajoutent la limitation des nouveaux recrutements à 16.501 postes parmi les sortants des écoles de formation et au profit de certains secteurs sensibles ministères de l’Education, Défense nationale et Intérieur en plus de certaines spécialités prioritaires, la couverture des besoins urgents par le redéploiement des ressources humaines entre les structures ministérielles ou établissements publics ou entre régions.
Il s’agit aussi de garantir une meilleure maîtrise et rationalisation des dépenses de gestion avec une diligence à la mise en place d’un programme pour la régularisation des arriérés de l’administration envers les fournisseurs publics, d’accorder une priorité absolue aux programmes et projets entamés et suspendus afin de les achever.
Cela sans tenir compte du remboursement du principal de la dette dans la limite de 11.501 MD, classé selon les dispositions de l’article 17 de la loi organique du budget parmi les charges de trésorerie. Les intérêts de la dette publique sont classés parmi les dépenses de financement selon les dispositions de l’article 15 de la loi organique du budget. Ainsi, les charges totales du budget de l’Etat au titre de 2021 s’élèvent à 52.617 MD (dont 100 MD au titre de prêts et avances de trésorerie). Il convient de signaler que les dépenses de développement atteindront en 2021 environ 7.148 MD.
Quant au service de la dette publique pour l’année 2021, il s’élève à 15.776 MD contre 11.825 MD prévu pour 2020 soit une augmentation de 3951 MD ou 33.4%.
L’encours de la dette publique atteindra 112.339 MD fin 2021 contre 99.942 MD prévu pour 2020, soit une augmentation de 12.397 MD due notamment au financement net du déficit budgétaire, de l’effet de la variation des taux de change et de l’augmentation des dépôts à la Trésorerie. De ce fait, l’encours de la dette publique sera de 92.7% du PIB contre 90.% Prévu pour 2020 et 72.5% enregistré en 2019.
Remboursement de la dette extérieure et intérieure
Selon la note sur l’exécution du Budget de l’Etat 2021 du mois de juin, élaboré par le ministère de l’Economie, des Finances et de l’Appui à l’investissement, la Tunisie devrait rembourser sur l’ensemble de cette année des échéances en principal de la dette extérieure d’un montant de 6.506 millions de dinars.
Au mois de juillet et août, «la Tunisie s’est acquittée du remboursement des deux emprunts obligataires assortis de la garantie des Etats-Unis pour des montants en principal égaux de 500 millions dollars, soit l’équivalent de 1.413 millions de dinars le 23 juillet 2021 et 1.397 millions de dinars le 3 août 2021».
Sur les quatre mois restants de l’année, «les échéances de remboursement sur dette extérieure et intérieure s’élèvent à 7,3 milliards de dinars, et ce, en plus des salaires de la fonction publique à assurer de septembre à décembre pour un montant total de 6,7 milliards de dinars (1,6 milliard de dinars par mois). Entre remboursement de la dette extérieur et intérieure et versement des salaires des fonctionnaires et autres dépenses, l’Etat aura besoin d’ici la fin de l’année de 19 milliards de dinars, soit 4,5 milliards de dinars par mois».